DeYi Studio
Résidence sémaphore #11
Résidence de repli, en lien avec le contexte du sémaphore du Créac’h à Ouessant.
Ouessant
Résidence sémaphore #11
Résidence de repli, en lien avec le contexte du sémaphore du Créac’h à Ouessant.
Au départ de ce projet il y avait la nécessité de trouver un point de chute en France pour l’été 2013 et le souvenir de vacances d’étudiant à Ouessant en 1979 après une émission de radio écoutée dans la pénombre inactinique d’un labo photo au sous-sol de la maison familiale à propos du cromlech de Pen-ar-Lan et d’hypothétiques et mystérieux vestiges d’alignements de mégalithes sur l’île.
Travaillant toute l’année à Shanghai, nous fréquentons régulièrement les jardins classiques de Suzhou. Notre intérêt pour les rochers ornementaux et les labyrinthes de rocailles de ces jardins, ainsi que pour les “gongshi”, ” (ces pierres étranges montées sur des socles sculptés que les lettrés plaçaient dans leur cabinet d’étude), nous a entrainés à regarder autrement les rochers d’Ouessant, lors d’un bref séjour en 2007, particulièrement ceux qui, en retrait de la côte, semblent posés sur l’herbe. Très rapidement la perspective d’une résidence au sémaphore d’Ouessant a imposé l’idée d’un raccourci spatio-temporel entre les rocailles extravagantes du jardin de la forêt des lions à Suzhou et les rochers extraordinaires de la pointe de Créac’h.
Dans une exposition du Musée Guimet en 2012, “Rochers de lettrés - itinéraire de l’art en Chine”, se trouvait une magnifique peinture sur papier de Lan Ying (1585-1664) conservée à New York au Metropolitan Museum of Art, intitulée “L’ami rouge”. Ce rouleau de deux mètres de haut représente uniquement une pierre provenant du lac Taihu à Suzhou. C’est juste le “portrait” d’un rocher.
Avec la chance de résider en juillet 2013 au sémaphore, notre intention était simplement de retrouver les rochers des pointes de Créac’h, de Porz Men et de Pern, comme de vieux amis, immobiles et silencieux, et de prendre le temps de rester près d’eux pour réaliser leur portrait. Nous ne savions pas encore exactement comment procéder. Notre première idée était de les observer à des heures différentes de la journée et de la nuit, et d’en faire des photographies en grand format. Mais peut-être s’agirait—il de dessins ou de peintures, ou pourquoi pas de modélisation 3D, ou même seulement de textes. En tous cas cela supposait une certaine proximité et une certaine durée.
Sans doute aurions-nous dû nous en tenir à ce beau voisinage, et nous contenter de donner des noms aux plus remarquables de ces amis tranquilles, selon la tradition des amoureux des pierres, à la suite du poète Tao Yuanming (365-427). Mais il est devenu difficile aujourd’hui à Shanghai de voir sans enregistrer et sans partager aussitôt sur les réseaux sociaux, et nous n’avons pas su éviter de prendre quelques courtes vidéos.
DeYi Studio, Shanghai, janvier 2018